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Une IA lit des centaines de milliers d’articles de presse par heure afin de prédire l’évolution des marchés financiers

Un algorithme de machine learning utilise analyse les sentiments exprimés dans les articles de presse, ce qui lui permet de prédire l’évolution des actions en bourse avec 76% de succès.

La finance de marché et le machine learning sont faits pour s'entendre. Ces deux activités consistent à analyser d'énormes quantités de données pleines de bruit afin d'y trouver des schémas récurrents qui puissent être utilisés pour faire des prédictions. Leur ressemblance est si étroite qu'il existe des formations universitaires à part entière dédiées à l'application des techniques de machine learning au trading. À l'intersection de ces deux domaines s'ouvre un royaume obscur mais extrêmement attrayant (comprenez : lucratif) qui a, déjà, séduit de nombreux ingénieurs.

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Le machine learning appliqué au trading sert le plus souvent à construire des modèles à partir de données financières : moyenne mobile des actifs, moyennes mobiles du volume des échanges commerciaux, volatilité des marchés, etc. Ces variables sont assez faciles à traduire en fonctions utiles pour entrainer des modèles de machine learning. Cependant, les valeurs boursières ne sont pas uniquement régies par des données financières historiques : elles sont soumises au monde réel.

Vous me direz que cette remarque va de soi, et pourtant : lorsque vous commencez à interprétez la finance de marché comme un gigantesque problème de math, il est facile d'oublier que les titres en bourse sont liés à des entreprises qui vendent, agissent, et sont dirigées par des humains. Or, cette inscription dans le réel est très difficile à gérer pour un algorithme, qui aura d'autant plus de mal à faire des prédictions boursières.

Pourtant, une société de gestion de placements appelé Triumph Asset Management a fait le pari de rendre les machines un peu plus habiles à ce jeu, grâce à un nouveau système qui analyse de grands volumes d'articles de presse à la recherche d'indicateurs pouvant être incorporés au sein de modèles prédictifs.

Mieux qu'un algorithme, j'aurais pu prédire que la présentation de Triumph lors de la GPU Technology Conference, qui s'est déroulée au coeur de la Silicon Valley la semaine dernière, attirerait une foule innombrable. Pourtant, j'ai été surpris par les vagues d'ingénieurs en informatique pervers souhaitant à toute force maitriser les arcanes de la prédiction automatique sur les marchés financiers. Il ne faut jamais sous-estimer l'appât du gain chez les nerds, j'imagine.

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Au coeur de la salle de conférence, le data scientist Rafael Nicolas Fermin Cota expliquait que son système était capable d'analyser un article de presse toutes les 3 ms, et donc plusieurs centaines de milliers d'articles par heure. Une tâche qui, il y a quelques années, aurait pris des semaines. Sa base de travail ? Le sentiment. Ou du moins, la version du sentiment que l'on peut mesurer de manière quantitative grâce à l'utilisation du traitement du langage naturel afin de déterminer si un article donné dit du bien ou du mal de telle ou telle société.

Triumph est capable d'évaluer de manière étonnamment fine les sentiments exprimés au sein d'un article (news, édito, dossier, chronique, etc.) grâce à l'algorithme GloVe, une technique récemment développé à Stanford. L'algorithme en question analyse la co-occurrence de mots et la fréquence à laquelle certains groupes de mots apparaissent l'un à côté de l'autre au sein d'un texte donné. Les statistiques de co-occurrence sont ensuite utilisées pour dégager des sous-structures au sein du texte ; celles-ci portent une signification qui outrepasse le sens des mots pris individuellement. (Une manière plus naïve et plus grossière de faire de l'analyse de sentiments consisterait à analyser la connotation positive ou négative de chaque mot, un par un, puis "d'additionner" ces connotations pour en déduire la tonalité du texte entier. Mais cette technique est source de nombreuses erreurs.)

Après avoir traité un grand nombre d'articles exprimant une large gamme de sentiments différents, le système détermine si les sentiments en question sont possiblement "vecteurs de changement" sur les marchés financiers - et donc s'il c'est le bon moment de vendre ou d'acheter des actions. Selon Triumph, l'IA fait des prédictions correctes 76% du temps. Pas mal.

Cependant, si ce genre de techniques se généralisait, elle se heurterait rapidement à ce que l'on appelle le "principe d'efficience des marchés" : lorsque un agent adopte son comportement (vendre ou acheter des actions, typiquement) sur la base d'une prédiction, la prédiction influe à son tour sur le marché et est rapidement incorporée dans le prix. Pour générer des gains à long terme, il faudrait donc modifier en permanence le système qui effectue les prédictions (et garder ses principes de fonctionnement confidentiels, bien à l'abri de la concurrence). Il n'en est pas moins que l'avenir de l'IA en bourse s'annonce plutôt brillant.

En parlant de paris osés et d'incertitude, ça y est, l'IA bat facilement les humains au poker. On peut imaginer qu'à long terme, elle redéfinira entièrement la notion de "coup de bol".