La tradition du disque de Noël est un truc tellement rincé qu’il ne reste plus guère aujourd’hui aux artistes que l’angle ironique et méta (ces deux portes de l’enfer de la pop moderne) pour s’y attaquer. Il y a cependant une époque où cette tradition était parfaitement ancrée dans les mœurs musicales, jusque dans les années 60 environ, après quoi la norme a été de chier copieusement sur cette tradition, comme on dit merde au Père Noël une fois passé l’âge canonique de sept ans. Durant les années 90-2000 les mecs chiants de l’indie rock (qui d’autre ?) ont bien tenté de raviver la flamme des chansons de Noël, avec des résultats plus ou moins heureux - pour un Julian Casablancas calamiteux, les Flaming Lips étaient là pour redresser la barre. On a également vu les rappeurs U.S se coller à l’exercice, avec Gucci Mane pour fêter son retour triomphant l’an dernier, ou plus récemment XXXTentacion et sa mixtape de l’enfer. Entre tout ça, on a surtout vu pendant près d’un demi-siècle, des disques à côté de la plaque, à la lisière de l’expérimentation et de la franche rigolade, mal foutus et souvent géniaux, qui en disent finalement pas mal sur la manière de concevoir un disque à travers les époques.
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Paul McCartney - Christmas Disc (inédit, 1965)
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Tout ça pour dire qu’on voit déjà cet échange plus ou moins amical dès les années 60 dans la manière qu’ont les deux entités d’aborder la tarte à la crème de l’album de Noël. Si l’école américaine prend l’exercice au pied de la lettre, façon mercantilisme total assumé, guirlandes dans les cheveux et zigouigouis farcis sous le sapin, les Anglais, eux, ont déjà ce truc de distanciation et de relecture du genre un peu flinguée. En témoigne cette mixtape de Paul McCartney sortie en 1965 et éditée alors à trois exemplaires (les vinyles de mauvaise qualité se seraient littéralement désintégrés depuis - mais on a retrouvé une cassette très récemment) à destination de ses quatre potes les plus fameux. On y entend des nursery rhymes, des sketches absurdes et des morceaux expérimentaux à base de tape loops, et même un morceau des rivaux américains des Beach Boys (qui, eux, voient évidemment l’exercice de l’album de Noël de manière beaucoup plus traditionaliste et premier degré). En bon rassembleur qu'il a toujours voulu être (mais qu’il n’a pas trop été au final, on rappelle que c'est lui le premier qui s'est barré des Beatles), l’ami Macca a voulu tout mettre dans ce cadeau farci comme une dinde mal dégrossie. C’est quand même une bonne occasion de découvrir le visage le plus aventureux de celui qui a été longtemps considéré comme le plus mièvre et timoré des Beatles. Un peu injuste lorsqu’on voit qu’il s’est adonné à l’expérimentation pendant une bonne partie de sa carrière, avec des résultats plus ou moins heureux certes.
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V/A - A Christmas Record (Ze Records, 1981)
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Crass - Merry Crassmas (Crass Records, 1981)
V/A - The Christmas Album (Sony, 1996)
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