Les mystères de Vermeer

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Culture

Les mystères de Vermeer

Avant d'aller au Louvre : quatre histoires que vous ne connaissiez pas à propos du peintre hollandais.

On ne connaît de Johannes Vermeer que trente-quatre toiles aussi ombreuses que certaines périodes de sa vie. Du timide regard de La Jeune fille à la perle à la célèbre Laitière devenue l'emblème des yaourts Nestlé, la plupart de ses toiles sont immensément connues partout dans le monde. De lui, en revanche, on ne sait pas grand-chose, si ce n'est qu'il n'a eu ni maître ni élève, qu'il n'a laissé aucun écrit ni aucun portrait et qu'il est mort brutalement à l'âge de 43 ans. Il y a réellement très peu de grands artistes postérieurs à la Renaissance sur lesquels on sache aussi peu de chose. À défaut de pouvoir admirer tout de suite 12 de ses tableaux exposés au Louvre jusqu'au 22 mai (c'est beaucoup trop blindé), Creators vous raconte quatre petites anecdotes pour briller en société.

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Qui de nous deux ? 
Deux jeunes femmes voilées de blanc et vêtues d'une longue robe surmontée d'une veste bleue. Enceintes peut-être, les yeux baissés, concentrées sur leur tâche, elles pèsent des bijoux. Même gestuelle, même environnement, même composition, presque tout, si ce n'est que la lumière et le choix des couleurs (le tableau de Hooch est dominé par des variations de rouges et d'ocre tandis que le Vermeer tire sur des tons plus froids, gris, bleus et bruns) sont étrangement similaires dans les tableaux. Encore plus troublant, ils auraient été réalisés la même année, en 1664. Quant à savoir qui de Hooch ou Vermeer aurait influencé l'autre… Personne n'a jamais balancé.

"Intérieur avec une femme pesant une pièce en or" de Pieter de Hooch et "La Femme à la balance" de Vermeer

Le mystère de la chambre noire
Le sphinx de Delf comme il fut surnommé avait il un truc pour reproduire avec cet extrême réalisme la lumière naturelle ? Cela n'a jamais été prouvé, mais il est possible que Vermeer regardait le monde à travers le prisme d'une chambre noire et analysait la lumière grâce à elle. Peut-être lui a-t-elle permis d'affiner ses perceptions. Ces « fondus lumineux » comme les ont qualifiés les experts et qui donnent un éclat tout particulier aux œuvres de Vermeer ne seraient-ils pas le résultat d'observations minutieuses à travers une camera obscura ? Vermeer peignait comme s'il reproduisait les effets de profondeur de champ qu'un appareil photographique met en évidence : certains éléments sont flous (le pain de La Laitière, la chaise de La Fille au chapeau rouge) d'autres sont davantage suggérés que réellement dessinés (le nez de La Jeune fille à la perle qui se confond avec sa joue). Il est indéniable que les tableaux du maître ont quelque chose de photographique… La question continue en tout cas d'agiter les spécialistes.

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"La Jeune fille à la Perle"

Recherche ruelle désespérément  
Seules deux toiles de Vermeer représentent des « extérieurs ». La Vue de Delft et La Ruelle, peinte vers 1658 et exposée au Rijksmuseum d'Amsterdam. Comme la plupart des tableaux de Vermeer, La Ruelle est une œuvre extrêmement paisible qui raconte un quotidien dans lequel chacun vaque à ses occupations : une enfant s'amuse à un jeu invisible, une femme coud et une autre s'affaire dans un étroit passage entre deux maisons de briques rouges. Jusqu'à ce que Frans Grijzenhout, un professeur d'Histoire de l'art à l'Université d'Amsterdam, mette son nez dans les Registres de droits de quai de 1667, on ignorait totalement que cette rue de Delft avait servi de modèle à Vermeer. C'est pourtant la maison de sa tante, au 40-42 de la Vlamingstraat (à la droite du tableau), qu'il aurait représenté sur cette toile. Ces documents ont révélé qu'aucun autre endroit à Delft ne pouvait correspondre aux indications décrites dans les registres, à part ces deux maisons. Bien qu'elles aient aujourd'hui été remplacées par des maisons modernes, les lieux sont encore un peu reconnaissables.

Made in Holland
Presque tout est énigmatique chez Johannes Vermer. Son œuvre (les experts ne s'accordent que sur l'authenticité de trente-quatre tableaux dont seulement vingt-trois sont signés et trois datés), son visage (il n'a jamais laissé aucun portrait de lui), sa pensée (nous ignorons tout de ses idées sur l'art) et même… sa date de naissance ! Nous savons seulement qu'un petit Johannes est baptisé le 31 octobre 1632 dans la Nouvelle église de Delft, fils de Reynier Vos et de Digna Baltens. Reynier Vos est surnommé « Ver Meer » ou « Van der Meer » : l'homme de la mer. Un commerçant qui aurait aussi été marchand d'œuvres d'art… Voilà tout. Quant à la mort du peintre, elle est aussi mystérieuse que sa naissance. Il succombe en 1675 sans raison apparente, laissant sa femme et ses onze enfants criblés de dettes. Sympa.

Détail de "L'Entremetteuse" (1656), autoportrait présumé de l'artiste

Lucie n'est pas Hollandaise pour un sou mais on peut la trouver sur Twitter.