toraja funérailles
Un jeune fume avec son oncle Songa, décédé il y a plus de 40 ans à l'âge de 70 ans.  Photo : Claudio Sieber
Culture

L'amour au-delà de la mort : les rites funéraires uniques des Toraja

Ce groupe ethnique indonésien prend soin des morts comme il prend soin des vivants, leur offrant de la nourriture, des vêtements, de l'eau et des cigarettes.

Pour les Toraja, qui habitent dans le pittoresque décor montagneux de Sulawesi, en Indonésie, la mort n’est pas un adieu définitif. Ils apprennent dès leur plus jeune âge à l'accepter comme faisant partie de la vie. Lorsque quelqu’un meurt, il devient un Toma Kula. Il est traité comme s’il était malade et se voit offrir quotidiennement de la nourriture, de l'eau et même des cigarettes, la croyance voulant que son esprit reste près de son corps et qu'il nécessite des soins continus. 

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Le corps sans vie est conservé et entretenu dans le tongkonan, la maison toraja traditionnelle. Les cadavres y restent pendant plusieurs mois, voire des décennies dans certains cas, jusqu'à ce que le clan puisse se permettre des funérailles en bonne et due forme et éventuellement programmer une cérémonie. Pendant ce temps, des plantes séchées permettent de neutraliser l'odeur du formol. 

Un buffle d'eau est sacrifié lors des processions funéraires. Son dernier souffle, connu sous le nom de Rambu Solo, marque la mort officielle d'un « malade ». Ce n'est qu'alors que son âme s’élèvera vers Puya, la version toraja de l’au-delà. Plus la famille est riche, plus il y a de buffles sacrifiés, et plus vite l'âme du défunt sera ramenée à Puya. Elle y vivra une vie après la mort agréable au côté de Dieu. Sans sacrifice, l'âme ne trouvera pas son chemin. Pour les nobles, l’Aluk To Dolo, la religion ancestrale des Toraja, recommande de sacrifier au moins 24 buffles, bien que le nombre exact soit suggéré par le chef local et ensuite discuté avec la famille. Certains invités apportent parfois des buffles supplémentaires en cadeau. Dans la culture toraja, la famille doit rembourser un buffle de la même gamme de prix lors des prochaines funérailles.

La famille rend visite à Nene' Tiku, décédée 3 jours plus tôt à l'âge de 106 ans. Photo : Claudio Sieber

La famille rend visite à Nene' Tiku, décédée 3 jours plus tôt à l'âge de 106 ans. Photo : Claudio Sieber

La cérémonie funéraire d'une famille de caste inférieure peut facilement coûter environ 50 000 dollars, mais pour les castes supérieures, la facture totale peut s’élever à environ 250 000 à 500 000 dollars. Les proches parents du défunt sont censés apporter au moins un buffle sacrificiel qui peut coûter entre 10 000 et 40 000 dollars sur le marché du bétail. Le prix dépend de la qualité de sa peau, de la longueur de ses cornes et de la couleur de ses yeux. 

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La cérémonie funéraire peut durer environ 3 à 5 jours et se termine par l'enterrement définitif du défunt dans un mausolée ou dans une tombe en pierre. Mais ça ne s'arrête pas là. Le clan se réunit tous les un à trois ans pour un rituel connu sous le nom de Ma'nene (« prendre soin des ancêtres »), qui consiste exhumer le défunt, le nettoyer, changer ses habits, avant de l’enterrer à nouveau. Les proches viennent de loin pour célébrer cette rencontre où ils se retrouvent, font la fête, partagent des souvenirs et honorent leurs proches. 

Plus de photos ci-dessous :

Ribka Tanduk Langi est mort à l'âge de 53 ans d'une insuffisance hépatique. Yari, le deuxième de ses huit fils, organisera les funérailles l'année prochaine. Photo : Claudio Sieber

Ribka Tanduk Langi est mort à l'âge de 53 ans d'une insuffisance hépatique. Yari, le deuxième de ses huit fils, organisera les funérailles l'année prochaine. Photo : Claudio Sieber

Toraja funeral

Risvan Patale ne peut pas s’éloigner de sa mère, Esther Paseru, décédée d'une crise cardiaque trois jours auparavant. Contrairement aux normes occidentales, les Toraja traitent leurs proches comme s'ils étaient malades plutôt que morts. Photo : Claudio Sieber

Toraja funeral

Clara tient dans ses bras sa sœur Arel, décédée à l'âge de 6 ans. Photo : Claudio Sieber

Toraja funeral

Les Toraja ont des rites funéraires uniques qui consistent notamment à habiller et à prendre soin de leurs proches décédés. Photo : Claudio Sieber

Funeral Toraja

Environ 800 invités ont assisté à cette cérémonie funéraire de cinq jours. Photo : Claudio Sieber

Toraja funeral

Plus la famille est riche, plus il y a de buffles sacrifiés, et plus vite l'âme du défunt sera ramenée à Puya. Photo : Claudio Sieber

Toraja funeral

Pendant le Rambu Solo, la famille prépare le corps pour l'enterrement. Photo : Claudio Sieber

Toraja funeral

Après quatre jours de funérailles, les proches endeuillés font défiler le cercueil du défunt, du stade provisoire au mausolée. Photo : Claudio Sieber

Toraja funeral

Le rituel Ma'nene commence par le nettoyage du cadavre et le changement de sa tenue. Photo : Claudio Sieber

Toraja funeral

Des enfants regardent leur cousin décédé il y a dix ans. Photo : Claudio Sieber

Toraja funeral

Après le Ma'nene, les proches honorent leur défunt en lui restituant ses accessoires préférés, comme des lunettes ou des sacs à main. Photo : Claudio Sieber

Toraja funeral

Le Ma'nene est toujours une bonne occasion pour les plus jeunes de rencontrer leurs ancêtres et, bien sûr, de prendre quelques selfies avec eux. Photo : Claudio Sieber

Toraja funeral

Les cercueils colorés sont sortis des tombes pour le Ma'nene. Photo : Claudio Sieber

Toraja funeral

La culture du riz est essentielle pour les Toraja. Au loin, les maisons traditionnelles, ou tongkonan, ont des toits surdimensionnés en forme de selle. Photo : Claudio Sieber

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