On a souvent fait des liens entre folie et création. Qu’ils soient justifiés ou non, personne ne niera la prégnance de l’image de l’artiste torturé dans notre inconscient collectif – en témoigne notre fascination pour les poètes maudits, les morts prématurées de Basquiat et Modigliani ou la moitié de la filmographie de Colin Farrell. Cette idée, née de la période romantique, s’est consolidée sous l’impulsion des surréalistes au début du siècle dernier et des pionniers de l’art brut, « l’art des fous », à l’image d’Adolphe Wölfli. Ainsi, le génie artistique pourrait-il être le fruit de la folie – à moins que ce ne soit l’inverse ? À en croire une étude du British Journal of Psychiatry datant de 2011, l’hypothèse n’est pas ridicule : les personnes créatives seraient plus touchées par des psychoses comme la schizophrénie et les troubles bipolaires. Souffrir pour créer. D’accord.
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Cependant, folie et création peuvent se côtoyer sans que l’une soit nécessairement issue de l’autre. C’est le cas notamment, dans l’art-thérapie, une pratique qui, comme son nom l’indique, consiste à exploiter les effets de l’art (la musique, la peinture ou toute autre modalité artistique) dans un dispositif thérapeutique. Dans une société plus rationnelle qu’intuitive, on conçoit de plus en plus que ce dernier puisse avoir des vertus cathartiques : de Nietzsche à Pépin, les philosophes se sont beaucoup intéressés aux potentiels bienfaits thérapeutiques de l’Art. Ainsi, en regardant un tableau de Bosch, de Bacon ou de Van Gogh, nous nous sommes dit qu’il était certainement possible de déceler la trace de folie chez leur créateur. Comme l’avait fait Hans Prinzhorn en 1922 avec Expression de la Folie, où il se basait sur les œuvres « d’aliénés », nous avons sélectionné douze artistes chez lesquels nous suspections une maladie mentale quelconque. Nous avons ensuite demandé à Régis Boguais, ancien vice-président de la Fédération française des art-thérapeutes (Ffat) et chargé d’enseignement en art-thérapie à l’université Paris I, si notre diagnostic était correct.Il faut rappeler avant toute chose que, lorsque l’on parle de diagnostic à partir de productions artistiques, il s’agit en fait de psychopathologie de l’expression, qui est la compétence des psychiatres et des psychanalystes. Ce n’est pas de l’art-thérapie, où un dialogue avec le patient est essentiel et exclu les interprétations diagnostiques contrairement à ce que peut fantasmer le grand public. Toutefois, les deux disciplines s’inscrivent dans un continuum historique. Cet exercice est plutôt à envisager comme une sorte de test projectif. De fait, il ne s’agit en aucun cas de poser un diagnostic normatif et irrévocable à partir d’une œuvre d’art, mais plutôt de tenter d’interpréter de manière subjective l’état mental hypothétique de l’artiste qui l’a créée.
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