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Technologie

Le fonofone : une app pour révolutionner l’apprentissage de la musique

De la création électroacoustique, direct dans le Apple Store

La création est en tête de liste des trois compétences que le ministère de l'Éducation souhaite développer en enseignement de la musique au primaire, devant l'interprétation et l'appréciation des pièces. Mais ce n'est peut-être pas si facile que ça, enseigner la créativité à la marmaille du Québec.

« C'est beau, ce sont des penseurs qui ont bien écrit tout ça, mais ils n'ont pas fourni aux professeurs les outils adéquats, déplore Yves Daoust, compositeur et figure importante de la musique électroacoustique au Québec. Il y a très peu d'espace pour la création dans nos systèmes scolaires. Tout est axé sur la performance. »

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En collaboration l'artiste multimédia Alexandre Burton, le septuagénaire travaille depuis 15 ans à mettre au point un outil qui pourrait changer la donne dans les classes québécoises.  Après des centaines d'ateliers auprès d'environ 3000 jeunes, le projet a abouti.

La première version avait d'abord pris la forme d'une machine à part entière, nommée Musicolateur. À l'ère du numérique, les deux concepteurs ont lancé la semaine dernière une version améliorée de cet instrument, sous forme d'application pour iPhone et iPad.

« Le hardware n'avait pas d'avenir avec le iPad », remarque Yves Daoust. Manufacturer un instrument alors que l'on peut développer un logiciel, c'était « impensable ». Ils se sont donc tournés vers un format est plus accessible et économique.

L'imaginaire au bout des doigts

Le fonctionnement de l'app est simple. On part d'une matière première, soit des sons que l'on enregistre ou que l'on pige à même la banque du Fonofone. Ensuite, à l'aide d'une série d'outils interactifs, non libellés, présentés sous forme de figures géométriques colorées, le fun commence. En jouant sur des paramètres comme la vitesse, la hauteur et le rythme, on sculpte les sons et on explore une myriade d'univers.

Yves Daoust a testé son app dans des classes et camps musicaux où, au fil d'explorations et de collaboration, les enfants créent des propositions musicales qu'ils retravaillent, répètent et peaufinent. Pour certains groupes, l'expérience s'est conclue avec un concert, joué en direct.

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« On a fait des réalisations parfois renversantes. Ça dépend bien sûr du temps dont on dispose avec un groupe, nuance le compositeur. C'est toujours intéressant. Si on peut travailler à long terme avec un groupe, là, c'est formidable. »

L'importance de la création

Le but du Fonofone, ce n'est pas de prendre des groupes d'enfants et d'en faire des musiciens. C'est plutôt de les rendre plus ouverts, dans tous les aspects de leur vie.

« Pour moi, c'est essentiel d'aller vers les jeunes et de leur faire découvrir qu'on peut faire autre chose que le beat, et qu'on peut écouter autre chose que du Madonna. J'ai rien contre Madonna! Mais il y a moyen d'être créatif avec le son, d'ouvrir ses oreilles, et de faire travailler son imaginaire. »

Yves Daoust juge fondamental le développement de la créativité des enfants, surtout aujourd'hui, où le monde du travail diversifié nous invite à « fabriquer nos emplois. Il faut être imaginatifs, créatifs », soutient-il. Il faut retrouver ce sens de l'émerveillement. Il faut aider les enfants… Ils l'ont naturellement, mais si on leur donne pas la chance d'en prendre conscience, ils ne le développeront pas. »

Le défi de l'accessibilité

Le fonofone est fin prêt à être exploré, mais le iPad, lui, n'est pas encore accessible dans toutes classes du Québec. Au privé, les tablettes sont évidemment plus présentes qu'à l'école publique, mais Yves Daoust remarque que petit à petit, des écoles commencent à s'en procurer - dans la mesure de leurs budgets.

Le compositeur s'affaire donc pour le moment à développer des outils pour guider les enseignants dans l'utilisation du Fonofone.

« D'ici quelques mois, on va offrir aux professeurs via le site web un cahier pédagogique. Il va y avoir des propositions de jeux, d'exercices à faire pour l'acquisition de diverses compétences, par exemple comment maîtriser les outils, à quelle fin. On va leur proposer des jeux avec des réalisations faites par des enfants, des banques de son, etc. » Il ajoute que des relations d'affaires se développent tranquillement avec l'Europe et les États-Unis. « C'est pas demain que tout le monde va adopter ça. Ça se développe tranquillement », précise-t-il.

Il demeure humble également quant à l'impact que pourrait avoir le Fonofone dans l'enseignement de la création musicale au primaire. « Ce n'est pas "la" solution, c'est une solution une parmi d'autres. Mais elle est valable et intéressante », soutient-il.